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Wilfrid DE CONTI
Temps de lecture: 8 mn environ
Illustration par Fanny Lamouroux

De plus en plus d’acteurs du marché mettent en avant les circuits courts comme argument écologique. Or, les dernières études sur le sujet démontrent que dans bien des cas, c’est une idée reçue. Besight a participé à un atelier de la fresque du climat et réalisé des recherches pour vous donner une idée de l’impact carbone du transport des goodies selon leur provenance. Voici donc un résumé des recherches pour vous expliquer comment calculer l’impact carbone d’un objet publicitaire.

Comment calculer l’impact carbone : la théorie

Pour bien comprendre la méthode de calcul des émissions de CO2, il faut introduire deux concepts :

  • Le nombre de tonnes de CO2 émis par moyen de transport : Il s’agit d’une donnée qui dépend de bien des facteurs comme par exemple l’énergie utilisée (hydrocarbures, électricité, …), son origine (renouvelable, fossile, etc…), le type de moteur utilisé etc.
  • Le produit tonnes-kilomètres : il correspond à la mesure de l’avancement d’une tonne de marchandises sur une distance d’un kilomètre par un moyen de transport donné. En gros, il permet de comparer deux moyens de transport sur une même base.

En multipliant ces deux grandeurs, on obtient l’impact carbone en gCO2/tonnes-kilomètres. Pour bien se le représenter, il s’agit de la quantité de CO2 que consomme un moyen de transport pour faire avancer une tonne d’un kilomètre. Cette donnée est importante car sinon, il est impossible de comparer un kilomètre d’une voiture avec un kilomètre d’un cargo qui ne transportent tous deux pas les mêmes quantités…

Voyons donc maintenant le calcul de chacun de ces paramètres:

Le calcul des émissions par moyen de transport (gCO2):

Calculer les émissions par moyen de transport, c’est un peu comme essayer de démêler une pelote de laine. Dès que l’on commence à tirer sur un fil, on se rend compte qu’il est enchevêtré avec d’autres fils qui eux aussi, sont entremêlés avec d’autres fils… En bref, tout est lié et si vous n’en êtes pas convaincus, nous vous renvoyons à un atelier de la fresque du climat pour le visualiser.

Cependant, les agences internationales du climat comme l’ADEME en France (Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie) ont calculé des valeurs moyennes qui peuvent être utilisées pour réaliser une première approche et trouver un ordre de grandeur des émissions du transport de marchandises.

Par exemple, voici les valeurs de référence pour le transport ferroviaire :

On compte donc en kg de CO2 émis par unité de mesure de la source d’énergie. Pour du Gazole par exemple, on calculera le nombre de tonnes brûlées que l’on multipliera par le facteur d’émission (à droite dans le tableau).

Toutes ces valeurs de références se trouvent dans le rapport de l’ADEME.

Le calcul de la distance et du poids transporté (tonnes-kilomètres) :

Aujourd’hui, grâce à tous les outils digitaux, il est assez facile de calculer une distance parcourue. Utiliser google maps pour le transport routier est à la portée de tous.

En ce qui concerne le transport maritime, des cartes interactives existent qui vous permettent en plus de voir en direct tous les cargos actuellement en transit dans le monde. En voici une du « Marine Traffic » :

Pour le transport ferroviaire, certains sites comme le monde en train ont répertorié la majorité des lignes de train en service. 

Enfin, lorsque vous obtenez la distance parcourue, il faut la multiplier par la masse transportée.

Le rapport des deux pour obtenir une mesure de l’impact carbone 

Pour terminer notre calcul, il suffit de diviser les émissions d’un moyen de transport par le nombre de tonnes-kilomètres transportées.

Comme nous l’avons vu, les données de base pour ce calcul sont très variables. Elles oscillent en fonction des pays selon la provenance de leur énergie (Nucléaire vs charbon par exemple), la proportion de moyens de transport électriques ou à énergies fossiles, etc… Par chance, M. Alan Mc Kinnon, professeur de logistique au Royaume Uni, a agrégé toutes ces données dans un document repris par l’ECTA :

Voici le tableau récapitulatif :

Ces valeurs permettent donc de réaliser une première approche de l’impact d’un transport de marchandises à l’international.

Cependant, comme le précise son étude, il faut autant que possible se rapprocher des valeurs réelles de son cas particulier afin d’obtenir un résultat plus fin et ne pas tirer des conclusions trop hâtives. Pour information, l’ADEME estime l’impact du transport ferroviaire français à 1.8 gCO2/tonne-km lorsque le train est électrique, contre 55 gCO2/tonne-km lorsqu’il fonctionne au diesel… Attention donc à bien tout prendre en compte pour être précis.

Le résultat des courses :

Les calculs sont donc complexes à réaliser lorsque l’on manque de données précises. En partant d’un trajet donné, nous pouvons arriver à des résultats totalement contradictoires selon les hypothèses choisies pour le calcul.

Heureusement, la méthode « macro » fonctionne toujours. Si l’on regarde le fret mondial et son impact par moyen de transport, on obtient une idée de l’impact « global » d’un moyen de transport par rapport à un autre.

C’est ce qu’ont fait les décodeurs du journal Le Monde dans un article dédié à ce sujet dont voici une infographie résumée :

On apprend dans cet article que le fret maritime représente 52% des émissions du fret, mais 87% des tonnes-kilomètres transportés. C’est à dire que le fret maritime transporte plus de 10 fois plus de tonnes-kilomètres pour seulement 32% de plus d’émissions de CO2. Ces chiffres proviennent d’une étude de 2017 de l’ITF (International Transport Forum).

La conclusion :

Le fret ferroviaire est donc une très bonne alternative pour réduire les émissions. C’est d’ailleurs la démarche de l’un de nos fournisseurs qui utilise majoritairement le fret ferroviaire pour réduire l’impact de sa supply chain. Aussi, le fret maritime est toujours un excellent moyen de réduire l’impact du transport des goodies grâce aux grandes quantités transportées.

La grande découverte :

Ce qui est complètement contre intuitif mais véridique, c’est que l’argument du circuit court pour réduire l’impact carbone n’a pas forcément de sens.

D’après notre atelier avec la fresque du climat, l’impact carbone d’un t-shirt transporté par Cargo entre la chine et le Havre est identique à son trajet entre le Havre et Paris en camion

Pour aller plus loin :

Il faudrait considérer l’impact global d’un goodies pour prendre des décisions intelligentes et non juste l’impact de son transport.

En effet, cet article ne parle que du transport et pourrait être généralisé à l’impact global d’un goodies en prenant en compte sa fabrication. C’est d’ailleurs souvent sur ce point que se joue la durabilité d’un goodies.

D’après les études citées, l’importation depuis la Chine a une meilleure empreinte carbone que le sourcing en France si l’on considère seulement l’impact carbone du transport. Prendre uniquement en compte l’origine est donc une fausse bonne idée. La recette actuelle (celle que l’on applique chez Besight) est de se concentrer sur l’utilisation de matériaux et de processus faiblement consommateurs en ressources pour la fabrication, même si l’origine des produits est lointaine car l’impact carbone est minimal dans les conditions actuelles.

Pour avoir un impact réel et non simplement pour votre image RSE, il est primordial de bien communiquer sur ces enjeux. D’ailleurs, nous avons décidé de devenir formateurs pour les ateliers de la fresque du climat si vous souhaitez vous aussi découvrir tous ces enjeux plus en détail. N’hésitez pas à nous contacter pour plus d’informations.

L’auteur :

Wilfrid de Conti
Professionnel de l’engagement et de la brand advocacy

4 Commentaires

  1. HEBRAS

    Article bien intéressant sur un sujet fondamental qui nous préoccupe aujourd’hui notre empreinte sur la planète et notamment quand on est en charge d’achats de marchandises comme moi
    Je souhaite clairement mieux cartographier mes flux mondiaux actuels et plus précisément challenger les flux provenance Chine vs fabrication française / européenne

    Réponse
    • Wilfrid DE CONTI

      Cher Stéphane,
      En effet, il s’agit d’un sujet fondamental et qui plus est, contre intuitif.
      La solution qui semble évidente n’est pas toujours la bonne. L’idéal est, comme vous le mentionnez, de réaliser une cartographie des flux avec un niveau de détail important et de caractériser leur impact carbone (en prenant en compte la fabrication dans l’équation).
      En procédant ainsi, on obtient de belles surprises…

      Réponse
  2. forzy

    Bonjour,
    je vous remercie pour cette réflexion.
    La question que je me pose, c est si cette réflexion est complète.
    en arrivant dans un port, votre produit (goodies) fera obligatoirement un trajet supplémentaire souvent en camion. Les derniers kilomètres (Le havre – Paris) ne semblent pas être pris en compte dans votre étude.
    donc pour moi un produit Français fera un nb de km qui sera souvent inférieur puisque vous ne comptez pas le transport de l’usine au port et du port au client final. Il y a donc de grande chance que même en impact carbone transport le goodies chinois soit plus couteux que le goodies Français
    merci pour votre retour

    Réponse
    • Wilfrid DE CONTI

      Bonjour Forzy
      Merci pour votre remarque pertinente.
      Les chiffres donnés dans cet article sont des chiffres généraux. Ils sont rapportés à la tonne.kilomètre donc dépendent de la distance effectivement parcourue.
      La logique reste la même et se justifie même d’autant plus lorsque l’on fait le focus sur un produit en particulier. Voici l’exemple d’un tote bag réalisé en Inde : https://www.linkedin.com/feed/update/urn:li:activity:6978666581547479040
      Vous y verrez les ordres de grandeurs.
      Attention néanmoins, ce calcul n’est valable que lorsque le transport est réalisé en porte conteneur.
      Au plaisir !
      La rédaction

      Réponse

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